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Le libéralisme ranime les nations - L'histoire de la Géorgie -


Gia Jandieri, économiste

Né en 1961. Il est diplômé de l'Université Technique de la Géorgie et de l'Université d'État de Tbilissi, avant de devenir membre de la commission électorale centrale et la tête du Ministère de l’Économie et des Finances de son pays. En 2001, il est co-fondateur de la New Economic School qu’il continue de servir à présent en qualité de vice-président.

Dans le passé la Géorgie, alors intégrée à l'URSS, a connu le régime communiste. Elle s’est profondément renouvelée depuis. Nous avons interviewé Gia Jandieri qui a contribué en tant que haut fonctionnaire du gouvernement aux courants de réforme qui ont libéré le pays du régime communiste.

Le communisme nous dépouille de nos motivations

Intervieweur

(I) : Quels sont les problèmes inhérents au communisme ?

Jandieri (J) : En termes simples, le communisme nous dépouille de nos motivations. Le communisme n’autorise pas la propriété privée. Cela signifie que nous sommes assurés de ne jamais récolter les fruits de tous les efforts que nous fournissons dans toute création de richesses. Il est naturel que beaucoup en Géorgie y aient perdu leur motivation à travailler.

Je vais évoquer brièvement ici l'histoire de la politique de la propriété privée en URSS. Lénine dirigeait alors le pays, et dès 1917 il a commencé à faire exécuter les propriétaires terriens, tels que les agriculteurs. Le gouvernement a ordonné aux agriculteurs de faire don au gouvernement de la totalité de leurs récoltes. Les agriculteurs s’y sont opposés du fait que leurs entreprises représentaient des investissements en capital. Jusqu’en 1934 le gouvernement a donc fait saisir de force l’ensemble des terres privées et exécuté la plupart des propriétaires.

Lénine a entrepris ces actions non seulement parce qu'il voulait confisquer ces terres, mais aussi parce que les propriétaires étaient opposés aux projets malveillants du gouvernement. Pour Lénine, il fallait les exterminer en tant que principaux représentants de l’opposition.

La Grande Purge entreprise par Staline à la fin des années 1930 est connue de beaucoup. Plus rares sont ceux qui ont entendu parler des exterminations entreprises par Lénine à l’encontre des propriétaires, du fait que les socialistes les ont masquées par la suite. Les mouvements de gauche ont en fait soutenu toutes les actions conduites à l’encontre de la propriété privée et des propriétaires, réhabilitant en quelque sorte du même coup ces événements.

Absence de propriété privée = dégradation morale

En même temps que la propriété privée nous a été retirée, nous perdions notre tradition morale avec elle, cette règle traditionnelle qui nous commandait de « ne pas voler ». « Pas de propriété privée » signifiait que « personne ne devait en posséder ». Chacun a commencé à penser : « Si personne ne possède rien, où est le vol ? » « Chapardons autant que nous pouvons ». La société soviétique incarna dès lors le pays où voler était devenu la norme. À défaut de propriété il n'y avait pas davantage de coopération : pour quelle raison devrions-nous coopérer ? L’absence de biens ne nous permettait pas de respecter mutuellement le droit à la propriété des autres.

C’est ainsi que dans les pays communistes où l’on rejetait la propriété privée, les personnes honnêtes et respectueuses des autres étaient les perdants, là où les plus corrompus qui acceptaient des pots de vin ou devenaient des voleurs, s’en sortaient mieux.

Un autre problème fondamental avait pris corps par ailleurs. Sous une autorité économique centralisée, comme c’est la règle dans un état communiste, des ordres de production sont donnés sans une information appropriée et actualisée de la consommation, qui permettrait par exemple de connaître la couleur recherchée pour les vêtements ou la matière la plus seyante pour les chaussures. C’est ainsi qu’ont été produites de grandes quantités de produits dont personne ne voulait. Il subsistait en outre un déséquilibre. Les voitures étaient par exemple vendues à des prix de loin supérieurs à nos attentes, mais tout le monde manquait de produits d’usage quotidien, comme le papier toilette ou le dentifrice.

Vers la fin de l'URSS, la Géorgie recevait d’une heure à l’autre des commandes contradictoires du gouvernement central.